Chapitre 03      



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Seuls les idiots croient la chance








Chapitre 03: Retrouvailles

gif décoratif en début de chapitre - Tas de fleurs de toutes les couleurs, poussé par le vent

« And I try to refrain but you're stuck in my brain. And all I do is cry and complain because second's not the same. » - Halsey




En moins d'une heure, la jeune femme avait défait sa valise et rangé toutes ses affaires dans sa chambre. La décoration de sa chambre n'avait pas changé, ses parents n'avaient rien touché. Lydie ne se retrouvait plus dans les couleurs qui avaient représenté son enfance qui semblait bien trop loin maintenant. Malgré ça, elle ne pouvait pas nier qu'elle se sentait de nouveau dans un véritable foyer. Soudainement, la demande de son frère, surprenante certes, lui paraissait signifiante. Ses absences prolongées avaient sûrement blessé ses parents, même s'ils n'avaient rien dit, cherchant à laisser leur fille guérir de ce qui pour eux n'était qu'un simple accident.

« Tu viens nous rejoindre pour dîner, Lydie ? »

La voix grave de son père la sortit brusquement de ses pensées. Elle se tourna vers son père, Isaac Sparte, pour lui répondre qu'elle arrivait dans un instant. Son père, cet homme d'un mètre presque quatre vingt dix, les cheveux poivre et sel dont une petite mèche tombait toujours sur son front, la mèche rebelle. Sa voix grave venait de son ancienne tendance à fumer, qu'il avait arrêter pour ses quarante ans, il y a une dizaine d'années. Elle laissa le livre qu'elle avait dans la main sur son lit et quitta sa chambre. Elle finit par rejoindre sa mère dans la cuisine, Hailee Sparte. Le mètre soixante cinq, la chevelure blonde cendrée et les yeux émeraudes, sa mère était une femme séduisante et aimante.

« Ben ne nous rejoint pas ?
— Ton frère mange très rarement ici, Lydie. »

Loin d'être étonnée la jeune femme se contenta d'un froncement de sourcils comme réponse. Si son absence avait sûrement peiné ses parents, elle pouvait facilement imaginer comment le comportement de son frère avait pu les affecter aussi. Elle ne l'avait pas entendu repartir, Ben était un vrai fantôme pouvant apparaître et disparaître avec une discrétion déconcertante. Elle préféra taire ses remarques pour le moment mais Lydie comptait bien poser des questions à ses parents.
Une fois à table, les trois membres de la famille Sparte commencèrent à manger, discutant de l'année universitaire qui venait de s'écouler pour la jeune femme.

« C'est bon de t'avoir à la maison, Lydie, finit par dire sa mère.
— Je suis contente d'être rentrée, maman. »

Et c'était vrai, malgré ses réticences, Lydie était heureuse de voir ses parents qui lui avait vraiment manqué au fil des mois. Elle avait eu le temps de se reconstruire, loin de cette ville, loin de ses souvenirs marqués par Danny. La demande brusque de Ben avait peut-être apporté du bien au final et ce serait l’occasion de se ressourcer.
La soirée avait continué avec ses parents près de la cheminée éteinte pour l'été mais qui restait le point de réunion de la famille. Lydie avait raconté quelques anecdotes de sa vie londonienne, la vie étudiante sous le regard heureux de sa mère et attentif de son père. Finalement fatiguée, elle avait laissé ses parents discuter entre eux pour aller se coucher. Elle déposa sa montre sur son bureau, assez loin de son lit pour ne pas être dérangée par le tic tac régulier et jeta un dernier coup d’œil à son téléphone avant de l'éteindre. Maintenant seule, elle avait tout le loisir de repenser à l'attitude de son frère avec ce chauffeur de taxi, c'était comme si elle avait pu sentir l'atmosphère se refroidir autour d'elle et le simple souvenir lui fit avoir la chair de poule. S'il avait gardé un ton égal, son regard avait été furibond, mais pour quelle raison ? Son comportement était toujours aussi déroutant, que pouvait-il gagner à agir de la sorte ? Ce fut sur ces dernières pensées que la jeune femme s'endormit.
Il n'était pas très tard, presque dix huit heures. Les jours commençaient à se rallonger avec le début du printemps alors il ne faisait pas encore nuit et Lydie appréciait cette période de l'année tout particulièrement. Mais alors qu'elle marchait pour rejoindre sa station de train pour rejoindre son studio dans le nord-ouest de Londres, elle eut l'impression soudaine d'être observée. Lors de son arrivée à Londres, après l'incident, elle avait souvent ressentit qu'elle était suivie, observée mais elle avait vite compris que c'était simplement une fausse impression. Car Londres était une ville si bondée, qu'on pouvait se retrouver à croire que quelqu'un nous suivait à chaque coin de rue. Mais ce soir paraissait différent ? Gardant une allure régulière, la jeune femme tenta de se rassurer, son imagination lui jouait encore des tours ? L'idée de se retrouver de nouveau suivie, traquée la rendait encore nerveuse malgré le chemin parcouru. Elle atteignit enfin sa station et s'assit dans son train habituel, même wagon, même place. Toujours aux aguets, elle jeta un coup d’œil sur l'ensemble du wagon, à moitié remplit avant de sortir son livre. Elle tourna quelques pages mais son esprit était ailleurs, la gorge nouée, elle n'arrivait pas à se débarrasser de ce sentiment angoissant qui prenait le dessus peu à peu. Elle releva la tête en soufflant et elle remarqua immédiatement un jeune homme assit dans un carré, à l'autre bout du wagon qui n'était pas là pendant sa première inspection. Il était habillé de manière discrète, un jean et un t-shirt noir, avec de simples basquettes. Pourtant son profil rappelait étrangement quelque chose à Lydie, mais qui pouvait-il être exactement ?
Secouant la tête, la jeune femme tourna la tête vers la vitre en soupirant. Elle devenait sérieusement paranoïaque par moment. L'évolution de la société ces dernières années avec la montée de l'individualisme, le nombre croissant d'agressions et l'incapacité à réagir contribuaient à cette paranoïa et sentiment d'agression permanent. Et le passé de Lydie n'aidait sûrement pas. Mais elle avait conscience que la plupart de ces idées se passaient seulement dans sa tête.

D'où elle pouvait bien connaître cet homme au final ?

Un bruit attira de nouveau son attention vers le jeune homme en question. Quand elle croisa finalement son regard, elle comprit que ce n'était pas de simples idées délirantes de son imagination mais qu'elle était bel et bien traquée de nouveau, tel un animal sauvage.

Brusquement, Lydie se redressa. Le corps tremblant, en sueur et la respiration irrégulière, elle passa sa main dans ses cheveux dans un geste nerveux. Ce rêve qui était en fait un vieux souvenir et avait plutôt des airs de cauchemar venait de la réveiller. Tentant de calmer les battements erratiques en contrôlant sa respiration, la jeune femme se rallongea doucement dans son lit.

Quelque chose clochait.


30 Juin (sept jours plus tard)


Lydie jeta un dernier coup d’œil dans son rétroviseur intérieur avant de sortir de la voiture. Comme elle l'avait dit à ses parents, elle allait profiter de ses vacances pour revoir ses anciennces amies de lycée et ce soir était le grand soir. Elle avait passé ces derniers jours à penser à son frère qu'elle n'avait pas revu depuis son arrivée, elle comptait lui parler mais n'avait aucune idée de comment l'aborder. Mais ce soir, elle ne penserait pas à lui et son comportement si étrange, la jeune femme allait profiter de ses amies.
Elle s'était garée dans une rue parallèle près du club où elle devait les rejoindre. Elle réajusta sa robe avant de glisser ses clefs dans sa pochette noire. Elle avait rendez-vous devant le club avec Grace et quelques amies, alors elle pressa le pas autant qu'elle pouvait avec ses chaussures pour les rejoindre pour ne pas les faire attendre. Elle retrouva sans mal le groupe d'amies dans la petite foule devant l'entrée qui rigolaient.

« Lydie ! La salua joyeusement Grace en la voyant arriver. »

Les filles arrêtèrent de rire en la voyant arriver et Lydie leur sourit chaleureusement. Grace fut la première à bouger pour la prendre immédiatement dans ses bras. Ce qui était une simple accolade se transforma rapidement en câlin groupé. L'amitié était si simples avec ces filles et la jeune femme leur était si reconnaissante de ne pas avoir abandonné leur amitié malgré son absence. Elles se détachèrent lentement les unes des autres en riant de nouveau.

Et la soirée allait pouvoir commencer.

Lydie n'avait jamais été fan de l'ambiance club de nuit. Les corps pressés les uns contre les autres, la sueur, la fumée, l'alcool, tout était prétexte pour le trop et l'extrême. Cependant, Grace avait insisté et Lydie n'avait pas voulu décevoir son ancienne amie. Effectivement, la première chose qui frappa la jeune femme fut l'odeur très particulière du club, ce mélange de sueur, alcool et renfermé. Les filles se dirigèrent directement vers le bar central et avec le bras de Grace sous le sien, Lydie se retrouva entraînée mais elle suivit le mouvement sans faire attention, contente de retrouver ses amies.
La soirée battait son plein, entre discussions aux tables, danses endiablées, quelques fous rires interminables et quelques cocktails bien servis.
Lydie était encore sur la piste de danse quand elle lâcha la main de Grace avant de lui faire signe qu'elle faisait une pause. Elle rejoignit le bar central pour s'asseoir près de Jessica qui sirotait son verre tranquillement.

« T'as vu ton frère ? »

Jessica jeta la bombe comme une simple question, pourquoi son frère se trouvait dans ce club le soir même où elle sortait ? Soudain alerte, Lydie jeta un coup d’œil à l'ensemble de la salle pour tenter de trouver son frère. Elle le trouva en quelques secondes, en retrait. Son regard était fixé sur quelque chose en particulier, au fond, invisible dans le champ de vision de Lydie et cette dernière n'aurait pas aimé être visée par ce regard, dur, froid, pétrifiant. Ben était totalement concentré sur le fond de la salle. Maintenant qu'elle avait aperçut son frère dans la salle, elle doutait que la soirée ne termine pour le mieux. Où Ben se rendait, les problèmes commençaient. Lydie se décolla lentement du bar, quand elle se rendit compte que la fumée au sol semblait plus épaisse et commençait à s'élever plus haut dans la salle. Ce n'était pas la même que celle du début de soirée, c'était indéniable. Les corps continuaient toujours à bouger en rythme et la musique assourdissante déconcentra Lydie : elle perdit son frère de vue. En quelques secondes, il avait disparu car la jeune femme avait été inattentive. Elle pesta contre elle-même avant de se déplacer d'abord sur la gauche, pour se détacher totalement du groupe de filles puis devant elle. Et elle percuta de plein fouet un corps qui venait d'arriver sur elle.

« Regarde où tu poses les pieds, blondasse. »

Furieuse, la jeune femme releva la tête pour en démordre avec celui qu'elle avait percuté. S'il n'avait pas crié par-dessus la musique, elle l'aurait sûrement ignoré, mais elle avait clairement entendu ce qu'il avait dit. Elle n'avait pourtant pas un caractère de feu mais ce genre de réflexion avait la fâcheuse tendance à la mettre hors d'elle. Bien plus grand qu'elle, il la dominait par sa hauteur. Il lui jeta un regard glacial, qui fit seulement hausser un sourcil à Lydie. Rentrer dans quelqu'un dans un club était plutôt fréquent et en général un simple « pardon » pouvait tout arranger. Mais le jeune homme en face d'elle serait loin de se contenter d'un pardon. Alors, par prudence, Lydie se décala de nouveau vers la gauche pour le laisser passer et heureusement pour elle, il passa sans lui adresser le moindre regard, comme si quelques secondes d'attention avaient déjà été trop. La jeune femme n'était pas stupide, rien ne servait de chercher la bagarre surtout dans ce genre d'endroit. Quand il la doubla pour accéder au bar, Lydie jeta un coup d’œil en arrière pour mieux l'observer. Il portait une tenue intégrale en noire : chaussures, pantalon, t-shirt.

« Arme ! »

Alors que quelques secondes auparavant, la foule dansait en rythme et avec en train, ce simple mot hurlé fut comme un coup de tonnerre  qui créa un mouvement de panique général.

La fête est finie.