♪ La fête est finie

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On se souvient du Orelsan de 2009, empereur du Junk Rap, volontiers caricatural et attachant mais capable de créer des polémiques jusqu’aux portes du pouvoirs. Arrivé en 2017, après deux albums à succès, une série, une marque de vêtement, et un film, Jimmy Punchline s’est forcément embourgeoisé, mais heureusement, sans vergogne. Avec « La fête est finie », les sirènes de chantent plus, et le succès est gagné d’avance, et pourtant, il demeure en Orelsan une forme d’honnêteté, voire même de naïveté, particulièrement touchante, tout en jouant sur le spleen et l’introspection.

Dès la sortie du clip de « Basique », tourné en Ukraine, on sentait qu’Orelsan avait désormais pleinement conscience du game dans lequel il est. D’ailleurs, dans « La fête est finie », nombreux sont les featuring étonnants, notamment avec Maitre Gims et surtout Dizzee Rascal, rappeur britannique en vogue, dans un morceau d’ailleurs initialement composé pour l’album « Cyborg » de Nekfeu. On retrouve également le belge Stromae ainsi que les sonorités métissées d’Ibeyi dans le morceau « Note pour trop tard », achevant l’album.

« La fête est finie » démarre sur les chapeaux de roues avec « San », morceau introspectif posant d’emblée les bases de ce que sera le reste de l’album : une forme de confession générationnelle directement adressée à la jeunesse sans circonlocutions, mais avec beaucoup d’émoi. Peut-être même trop. Au risque de devenir parfois pompeux, Orelsan tombe dans le piège de la redondance, et n’a de cesse de se répéter, ce qui fait de son album un tableau acide, mais disparate. On pourrait également reproché à d’autres tracks d’être clichés, dont « Basique », qui, même si il assume sa facilité, n’en demeure pas moins faussement pertinent.

De nombreuses thématiques sont abordés dans cette album-fleuve : la famille, les femmes, l'argent, mais aussi la torpeur quotidienne. À ce titre, Orelsan aborde avec un recul spectaculaire sa carrière. Il se décoince de son image maussade d’éternel perdant, et parvient à se hisser à la hauteur de la concurrence, à l’aide notamment d’une plume assez jouissive, visible dans le morceau « Christophe », avec Maitre Gims (« Christophe Maé, Keen’v »). On note également les intru, des sample discrets aux sons plus dansants, donnant à l’album un rythme inégal, mais l’inscrivant parfaitement dans son époque.

Alors une chose est sure, on ne défendra pas Orelsan pour sa prétendue originalité, ou sa soi-disant justesse, mais plutôt pour sa sincérité, son personnage toujours fort, et l’humilité avec laquelle il aborde ce blockbuster musical lyrique, hybride et mélancolique. Il parvient à inventer une fête finie mais inachevée, dérisoire mais essentielle. « La fête est finie », la fin d’un début de carrière, mais aussi le commencement d’une nouvelle maturité musicale. Quand l’imbécile intelligent se transforme en intelligent imbécile. Une volupté de fin gourmet.

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